Algernon se prélassait dans son somptueux appartement londonien, l'esprit probablement fourmillant de remarques spirituelles et de répliques astucieuses.Cette après-midi paisible fut interrompue par l'entrée de Lane, le majordome d'Algernon. Lane incarnait le serviteur anglais par excellence, droit comme un i et aussi expressif qu'une planche.Avant qu'Ernest ne fasse son entrée, quelque chose attira l'attention d'Algernon. Un étui à cigarettes trônait sur la table, oublié et solitaire, tel un intrus dans un bal. Algernon avait de nombreuses qualités, mais la subtilité n'en faisait pas partie.Il s'empara de l'étui, le tournant entre ses mains comme un enfant devant un cadeau de Noël. Et là, bingo! À l'intérieur se trouvait une inscription à faire dresser l'oreille du plus indiscret des voisins: «De la part de la petite Cecily, avec tout son amour pour son cher oncle Jack». Oncle Jack? Voilà qui était surprenant. Aux dernières nouvelles, Ernest n'avait pas d'oncle Jack.Ernest fit son entrée, tout sourire et charmant, ignorant la tempête qui se préparait. Algernon l'accueillit chaleureusement, mais son esprit galopait plus vite qu'un pur-sang.Algernon, doux comme un agneau, aborda le sujet l'air de rien. La réaction d'Ernest? On aurait dit un poisson hors de l'eau. Il cherchait ses mots, son visage passant par toutes les couleurs de l'arc-en-ciel.Plus Ernest se débattait, plus Algernon le poussait dans ses retranchements. C'était comme un chat jouant avec une souris, mais une souris en costume trois pièces avec beaucoup à perdre. Ernest essayait de noyer le poisson, parlant de tout et de rien, du beau temps et de la tante d'Algernon.La tension était palpable dans la pièce. On se serait cru dans une cocotte-minute, avec Ernest comme ingrédient principal et Algernon qui augmentait la pression.Puis vint le coup de grâce. Algernon lâcha le nom de «Jack» comme une bombe, et Ernest eut l'air d'avoir reçu un coup de massue.Au fil des révélations d'Algernon, il devint évident qu'il ne s'agissait plus seulement d'un étui à cigarettes.Cette après-midi qui avait commencé si banalement s'était transformée en un jeu de la vérité sans échappatoire. L'arôme de l'Earl Grey flottait dans l'air, se mêlant à celui de la sueur d'angoisse d'Ernest.Les épaules d'Ernest s'affaissèrent et il poussa un profond soupir. La partie était finie, et il le savait. Il regarda Algernon, qui le fixait avec des yeux brillants comme un chat devant sa proie.