1. L'arrivée de Fanny à Mansfield Park Le cœur de Fanny battait la chamade lorsque la voiture s'arrêta devant l'imposante propriété. Mansfield Park se dressait devant elle, tel un géant intimidant qui la faisait se sentir plus minuscule que jamais. En descendant, ses jambes flageolaient et elle faillit trébucher. L'endroit était colossal, d'une ampleur qu'elle n'avait jamais vue auparavant.Sir Tomas et Lady Bertram l'accueillirent avec une raideur guindée. Ils lui sourirent, mais leurs yeux scrutateurs la détaillaient comme une curiosité de foire. Leurs enfants étaient là aussi, formant un tableau hétéroclite. Tom, l'aîné, semblait se ficher éperdument de Fanny. Il avait l'air de s'ennuyer à mourir, souhaitant visiblement être ailleurs. Les filles, Maria et Julia, chuchotaient et gloussaient en lorgnant la vieille robe élimée de Fanny. Mais il y avait Edmunde, le cadet.Et puis il y avait Mme Norris, la sœur de Lady Bertram. C'était elle qui avait orchestré toute cette histoire pour amener Fanny à Mansfield Park. Elle s'affairait comme une abeille, s'inquiétant de l'apparence de Fanny et ne cessant de vanter sa propre générosité. Mais ses paroles étaient du venin enrobé de miel.En franchissant le seuil de Mansfield Park, Fanny eut l'impression de pénétrer dans un autre monde. Les sols étaient si lustrés qu'on pouvait s'y mirer, et des lustres scintillaient partout comme un ciel étoilé. Les meubles étaient si raffinés et délicats que Fanny craignait de les approcher. Rien à voir avec son ancienne demeure, où flottait toujours une odeur de poisson et de sel. Ici, tout embaumait les fleurs et les parfums luxueux.Au fil des jours, Fanny s'efforça de trouver ses repères. Tout dans cette nouvelle vie était aussi déroutant que de déchiffrer un livre dans une langue inconnue. Le dîner était un véritable calvaire. Il y avait tellement de couverts que Fanny ne savait lesquels utiliser. Elle se trompait invariablement, et Maria et Julia échangeaient des regards complices, comme partageant une plaisanterie privée. Sans parler de ses efforts pour s'orienter dans la maison.Le soir, dans le calme, le mal du pays frappait Fanny de plein fouet. Elle se blottissait dans son nouveau lit, qui lui semblait aussi vaste qu'un océan et bien trop moelleux, regrettant les ronflements de ses frères et sœurs et le bruit lointain des vagues. Le silence à Mansfield Park était si pesant qu'on aurait pu le couper au couteau.Alors que Fanny croyait se noyer dans cette solitude, Edmunde lui tendit une bouée de sauvetage. Remarquant son désarroi, il décida de la prendre sous son aile. Tel un professeur patient, il lui expliqua toutes les règles sociales absconses et lui fit visiter l'immense domaine. Un jour, il la surprit en pleurs, rongée par le manque de sa famille. Au lieu de la taquiner ou de lui dire de se ressaisir, il s'assit à ses côtés, lui offrit son mouchoir et l'écouta.La gentillesse d'Edmunde était comme un baume apaisant sur une plaie à vif. Elle enveloppa Fanny, lui donnant la force d'affronter chaque jour ce nouveau monde étrange. Il devint son confident, celui à qui elle pouvait tout dire. Peu à peu, Fanny se mit à attendre leurs conversations avec impatience.Progressivement, Fanny commença à trouver sa place à Mansfield Park. La demeure, qui lui avait d'abord paru monstrueuse et effrayante, lui devint plus familière. Elle s'habitua aux règles de bienséance, même si elle ne s'y sentait jamais totalement à l'aise.Tandis que Fanny s'adaptait à sa nouvelle vie, elle ne pouvait s'empêcher de s'interroger sur l'avenir. Mansfield Park, avec tout son faste et ses manières compliquées, était devenu son foyer. Certes, une partie d'elle regretterait toujours la simplicité de sa vie d'antan, mais elle commençait à être curieuse de ce que l'avenir lui réservait.Pourtant, alors qu'elle commençait à prendre ses marques, elle ne parvenait pas à se défaire d'un pressentiment tenace que les choses n'allaient pas rester tranquilles bien longtemps. Il y avait quelque chose dans l'air, une tension qu'elle n'arrivait pas à définir. C'était comme le calme avant la tempête, et Fanny ne pouvait s'empêcher de se demander quelles épreuves l'attendaient au tournant.
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